Qivalis : 10 banques européennes s’unissent pour un stablecoin euro

📋 En bref (TL;DR)

  • 10 grandes banques européennes dont BNP Paribas, ING et UniCredit créent Qivalis pour lancer un « stablecoin » euro
  • Lancement prévu au second semestre 2026 après obtention d’une licence EMI aux Pays-Bas
  • Objectif : contrer la domination du dollar américain qui représente 99% du marché des stablecoins
  • Le projet sera conforme à MiCA, la nouvelle réglementation européenne sur les crypto-actifs
  • Direction assurée par Jan-Oliver Sell (ex-Coinbase Allemagne) et Sir Howard Davies (ex-FSA britannique)

L’Europe fait un pas décisif vers la souveraineté monétaire numérique. Dix des plus grandes banques du continent viennent d’annoncer la création de Qivalis, une entreprise commune basée à Amsterdam. Son objectif est ambitieux : lancer un « stablecoin » adossé à l’euro pour rivaliser avec les géants américains comme Tether (USDT) et Circle (USDC). Cette initiative historique pourrait redessiner le paysage des paiements numériques en Europe.

Un consortium bancaire européen inédit

Qu’est-ce qu’un stablecoin ? Il s’agit d’une cryptomonnaie dont la valeur est indexée sur une monnaie traditionnelle, généralement le dollar américain ou l’euro. Contrairement au Bitcoin dont le prix fluctue fortement, un stablecoin maintient une valeur stable de 1 pour 1 avec sa devise de référence.

Le consortium Qivalis rassemble dix établissements bancaires majeurs représentant plusieurs pays européens :

  • BNP Paribas (France) – première banque de la zone euro
  • ING (Pays-Bas) – pionnier de la banque en ligne
  • UniCredit (Italie) – acteur majeur en Europe centrale
  • CaixaBank (Espagne) – leader du marché espagnol
  • Danske Bank (Danemark) – plus grande banque nordique
  • DekaBank (Allemagne) – gestionnaire d’actifs des caisses d’épargne allemandes
  • KBC (Belgique) – groupe bancaire et assurance
  • Raiffeisen Bank International (Autriche) – présent en Europe de l’Est
  • SEB (Suède) – banque scandinave historique
  • Banca Sella (Italie) – banque familiale innovante

Cette alliance représente une force financière considérable. Ces banques gèrent collectivement des milliers de milliards d’euros d’actifs et servent des dizaines de millions de clients à travers l’Europe.

Une direction venue du monde crypto

Pour piloter cette initiative, les banques ont recruté des profils expérimentés, mêlant expertise crypto et crédibilité institutionnelle.

Jan-Oliver Sell occupe le poste de directeur général. Son parcours est révélateur de la convergence entre finance traditionnelle et crypto. Il a dirigé Coinbase en Allemagne avant de rejoindre Binance, les deux plus grands « exchanges » (plateformes d’échange) mondiaux. Cette double expérience lui confère une vision unique des défis réglementaires et opérationnels.

À la présidence du conseil d’administration, on retrouve Sir Howard Davies. Ce banquier britannique apporte une légitimité institutionnelle considérable. Il a notamment dirigé la Financial Services Authority (FSA), l’ancien régulateur financier britannique, et présidé NatWest, l’une des plus grandes banques du Royaume-Uni.

Floris Lugt complète l’équipe dirigeante en tant que directeur financier. Son expérience chez ING Digital Assets garantit une maîtrise des aspects financiers propres aux actifs numériques.

Contrer la domination écrasante du dollar

Pourquoi les banques européennes se lancent-elles dans cette aventure ? Les chiffres parlent d’eux-mêmes. Le marché des stablecoins représente aujourd’hui plus de 200 milliards de dollars. Or, les stablecoins adossés au dollar américain captent 99% de ce marché.

Tether (USDT) domine avec une capitalisation dépassant 140 milliards de dollars. Circle (USDC) suit avec environ 40 milliards. Ces deux entreprises américaines contrôlent donc l’essentiel des transactions crypto mondiales.

Cette situation pose un problème de souveraineté pour l’Europe. Chaque transaction en USDT ou USDC renforce la dépendance européenne au système financier américain. Dans un contexte géopolitique incertain, cette vulnérabilité devient stratégique.

Comme l’a souligné Jan-Oliver Sell lors de l’annonce : « L’Europe ne peut pas laisser sa monnaie numérique aux mains d’acteurs étrangers. Nous devons construire notre propre infrastructure. »

MiCA : le cadre réglementaire européen

Qivalis arrive à un moment charnière. Le règlement MiCA (Markets in Crypto-Assets) est entré pleinement en vigueur en décembre 2024. Ce texte européen établit pour la première fois un cadre juridique clair pour les crypto-actifs.

Pour les stablecoins, MiCA impose des exigences strictes :

  • Réserves liquides : l’émetteur doit détenir des actifs équivalents à 100% des tokens en circulation
  • Transparence : publication régulière d’audits sur la composition des réserves
  • Licence : obtention d’un agrément de type EMI (Établissement de Monnaie Électronique)
  • Protection des consommateurs : droit au remboursement à tout moment

Qivalis sollicite actuellement une licence EMI auprès de la De Nederlandsche Bank (banque centrale néerlandaise). Le choix d’Amsterdam comme siège n’est pas anodin. Les Pays-Bas offrent un environnement réglementaire favorable et une expertise reconnue dans les paiements numériques.

Cette conformité MiCA représente un avantage concurrentiel majeur. Tether a d’ailleurs dû retirer son stablecoin euro (EURT) du marché européen faute de pouvoir se conformer aux nouvelles règles.

Le marché des stablecoins euro en pleine mutation

MiCA a déjà transformé le paysage des stablecoins euro. Les tokens conformes à la réglementation représentent désormais 67% du marché des stablecoins euro. Circle a pris les devants en obtenant une licence pour son EURC en France.

Cependant, le marché reste modeste comparé aux stablecoins dollar. La capitalisation totale des stablecoins euro ne dépasse pas quelques milliards d’euros. Qivalis ambitionne de changer cette donne en apportant la crédibilité des banques traditionnelles.

Cette initiative européenne s’inscrit dans une tendance mondiale. Dix grandes banques internationales, dont Goldman Sachs et Bank of America, travaillent également sur un projet de stablecoin bancaire. Au Japon, les trois plus grandes banques développent un stablecoin adossé au yen.

Les cas d’usage visés par Qivalis

Le stablecoin euro de Qivalis cible plusieurs marchés :

Paiements transfrontaliers

Les virements internationaux restent lents et coûteux via le système bancaire traditionnel. Un stablecoin permet des transferts quasi instantanés avec des frais réduits. Pour les entreprises européennes commerçant à l’international, c’est un gain d’efficacité considérable.

Finance décentralisée (DeFi)

Les protocoles de finance décentralisée nécessitent des stablecoins fiables. Un token émis par des banques régulées rassure les investisseurs institutionnels qui hésitent à utiliser des stablecoins existants.

Tokenisation d’actifs

La tokenisation consiste à représenter des actifs traditionnels (immobilier, obligations, actions) sous forme de tokens sur une blockchain. Ces transactions nécessitent un moyen de paiement stable et régulé. Un stablecoin bancaire européen répond parfaitement à ce besoin.

Calendrier et défis à relever

Qivalis vise un lancement au second semestre 2026. Ce délai s’explique par plusieurs étapes obligatoires :

  • Obtention de la licence EMI (6-12 mois)
  • Développement de l’infrastructure technique
  • Intégration avec les systèmes bancaires des partenaires
  • Tests et audits de sécurité

Plusieurs défis attendent le consortium. La concurrence sera rude face à Circle (EURC) déjà établi. L’adoption par les utilisateurs reste incertaine, car les habitudes crypto sont ancrées autour du dollar. Enfin, la coordination entre dix banques de cultures différentes représente un défi organisationnel.

Ce que cela signifie pour l’écosystème crypto

L’arrivée de Qivalis marque un tournant. Pour la première fois, des banques traditionnelles majeures s’engagent directement dans l’émission de stablecoins. Cette légitimation pourrait accélérer l’adoption institutionnelle des crypto-actifs en Europe.

Les institutions financières montrent un intérêt croissant pour les stablecoins. Une étude récente révèle que 49% d’entre elles prévoient d’utiliser ces actifs d’ici trois ans. Un stablecoin émis par des banques de confiance faciliterait cette transition.

Pour les utilisateurs particuliers, cela signifie davantage de choix et potentiellement une meilleure protection. Un stablecoin bancaire bénéficie de la supervision des régulateurs et de la solidité financière de ses émetteurs.


📚 Glossaire

  • Stablecoin : cryptomonnaie dont la valeur est indexée sur une monnaie traditionnelle (euro, dollar). Contrairement au Bitcoin, sa valeur reste stable.
  • MiCA : règlement européen « Markets in Crypto-Assets » entré en vigueur en 2024. Il établit un cadre juridique pour les crypto-actifs dans l’Union européenne.
  • EMI (Établissement de Monnaie Électronique) : licence bancaire permettant d’émettre de la monnaie électronique. Obligatoire pour les émetteurs de stablecoins en Europe.
  • DeFi (Finance décentralisée) : ensemble de services financiers (prêts, échanges, épargne) fonctionnant sur blockchain sans intermédiaire bancaire.
  • Blockchain : technologie de registre distribué permettant d’enregistrer des transactions de manière sécurisée et transparente.
  • Tokenisation : processus de représentation d’un actif réel (immobilier, action) sous forme de jeton numérique sur une blockchain.

❓ Questions Fréquentes

Qu’est-ce que Qivalis exactement ?

Qivalis est une entreprise basée à Amsterdam créée par 10 grandes banques européennes. Son objectif est d’émettre un stablecoin euro conforme à la réglementation MiCA. Le lancement est prévu pour le second semestre 2026.

Quelles banques participent au projet Qivalis ?

Le consortium rassemble BNP Paribas, ING, UniCredit, CaixaBank, Danske Bank, DekaBank, KBC, Raiffeisen Bank International, SEB et Banca Sella. Ces banques représentent huit pays européens différents.

Pourquoi l’Europe a-t-elle besoin d’un stablecoin euro ?

Actuellement, 99% des stablecoins sont adossés au dollar américain. Cette situation crée une dépendance au système financier américain. Un stablecoin euro renforce la souveraineté monétaire européenne dans l’économie numérique.

Quelle différence avec l’euro numérique de la BCE ?

L’euro numérique de la BCE serait une monnaie de banque centrale (CBDC). Le stablecoin de Qivalis est émis par des banques commerciales privées. Les deux peuvent coexister avec des usages complémentaires.

Le stablecoin Qivalis sera-t-il plus sûr que Tether ?

Qivalis sera soumis à la réglementation MiCA qui impose des réserves à 100%, des audits réguliers et une supervision bancaire stricte. Tether fait régulièrement l’objet de critiques sur la transparence de ses réserves. En savoir plus sur les stablecoins

Quand pourra-t-on utiliser le stablecoin Qivalis ?

Le lancement est prévu pour le second semestre 2026. Qivalis doit d’abord obtenir sa licence d’établissement de monnaie électronique auprès de la banque centrale néerlandaise, puis développer et tester son infrastructure.


📚 Sources

Cet article s’appuie sur les sources suivantes :

  • CoinDesk – Annonce officielle de la création de Qivalis
  • Ledger Insights – Analyse du projet et contexte réglementaire
  • PYMNTS – Détails sur les banques participantes
  • The Block – Profils des dirigeants et calendrier
  • BNP Paribas – Communiqué de presse officiel

Comment citer cet article :
Fibo Crypto. (2025). Qivalis : 10 banques européennes s’unissent pour un stablecoin euro. Consulté le [date] sur https://fibo-crypto.fr/qivalis-banques-europeennes-stablecoin-euro